Des églises pour l’Église

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Depuis la loi de 1905, les diocèses ne sont plus propriétaires de toutes leurs églises et des bâtiments afférents, l’Etat ayant choisi de les faire siens. Or, la ville de Marseille s’est beaucoup développée au XXe siècle et des lieux de cultes ont été construits après 1905 pour accompagner le développement de la ville. Conséquence : près de 38% des églises locales appartiennent au diocèse et sont donc à sa charge. Entretien avec François Leroy, économe diocésain.

Que représente le patrimoine immobilier du diocèse de Marseille ?

 A Marseille, le diocèse dispose d’un patrimoine immobilier d’environ 240 000 m² (cf. encadré). Les 97 églises communales – qui sont à la charge de la ville et dont le diocèse n’est qu’affectataire – représentent 62 % des églises du diocèse, alors que cette proportion dépasse 90% dans la majorité des autres diocèses de France. Avec 38% de lieux de culte lui appartenant en propre, notre diocèse à une proportion importante d’églises – 60 – et de bâtiments, nécessitant d’importants budgets d’entretien, de restauration, de valorisation.

Deux ou trois chantiers de réparations d’une voûte ou d’un clocher ou de réfections de toitures d’églises sont réalisés en moyenne chaque année sur les 60 églises diocésaines. Ces travaux sont financés par les réserves de trésorerie de l’archevêché ou des paroisses, auxquelles s’ajoutent les souscriptions ouvertes à la générosité des fidèles.

C’est pourquoi, chaque année, le diocèse lance un appel aux dons destiné à financer ces chantiers. L’an passé, l’appel concernait la restauration historique de la Bonne Mère, avec la réfection du clocher et la redorure de la statue, car Notre-Dame de la Garde est propriété du diocèse : plus de 500 000 € ont été donnés par des particuliers, pour un budget total de travaux de 2,8 M€. Qu’ils en soient remerciés !

Après la Bonne Mère, quel sera le grand chantier de 2025 ?

 Il nous faudra mener d’importants travaux à l’église Saint Louis (voir article p. XX), située dans le 15e arrondissement, inscrite depuis 1989 au titre des monuments historiques et gravement menacée par des infiltrations d’eau. Cette église, construite en 1935, est aussi propriété du diocèse mais, aussi unique soit-elle, elle n’a pas la même notoriété ni le même attrait touristique que Notre-Dame de la Garde : il sera sans doute difficile de collecter autant de dons alors que les premières estimations définissent une enveloppe financière aussi importante que celle nécessaire au chantier de la Bonne Mère !

Cette opération devrait néanmoins bénéficier d’une subvention de l’Etat au titre des monuments historiques. Il n’est pas question de nous défaire de cette église, et nous allons tout faire pour trouver les financements nécessaires. Mais parfois, le choix peut être fait, jamais de gaieté de cœur évidemment, de vendre une église. Le diocèse n’a pas la capacité financière de dépenser chaque année plusieurs millions d’euros pour des travaux de réfection des églises et il faut faire des choix, aussi douloureux soient-ils.

 

A ce sujet, le projet de vente de l’église Saint-Maurice à Pont-de-Vivaux, actuellement en cours, a eu un large écho dans la presse. Pourquoi et comment le diocèse en vient-il à se séparer d’une église ou d’un bâtiment qui lui appartient ?

 Le diocèse de Marseille doit entretenir à ses frais les 60 églises lui appartenant en propre, construites après la loi de séparation des Églises et de l’Etat et situées pour leur majorité en périphérie de la ville, des 10e au 16e arrondissements de Marseille. Les 97 autres églises dont elle a seulement l’usage, en tant qu’affectataire, dépendent du domaine public et sont à la charge des communes qui en assurent l’entretien et les réparations.

L’ouverture la plus large des églises étant essentielle à la mission d’annonce de l’Evangile, la décision de se séparer d’une église est toujours une décision difficile. Elle ne peut d’ailleurs être prise que dans des cas très exceptionnels, lorsque les messes ne peuvent plus y être célébrées sans présenter de danger pour les fidèles, quand le montant des travaux nécessaires pour permettre la réouverture au public excède largement les capacités financières du diocèse, ou encore lorsque ces églises ne présentent pas un intérêt historique et architectural justifiant de manière absolue leur conservation.

Je précise aussi qu’une église ne peut pas être vendue sur simple décision du diocèse : c’est d’abord au niveau de la paroisse – dans le conseil paroissial et le conseil économique de la paroisse – que la décision est prise. Elle est ensuite soumise à l’appréciation du collège des consulteurs, du Conseil diocésain pour les affaires économiques (CDAE) et du conseil épiscopal, qui entoure l’archevêque. Après toutes ces étapes seulement, l’association diocésaine est autorisée à mettre une église en vente.

La vente de la maison diocésaine Le Mistral a aussi été évoquée. Où en sommes-nous ?

 Le Centre Le Mistral, ancien petit séminaire de Marseille, a formé des générations de prêtres marseillais. Ce bâtiment de près de 5 000 m² a été affecté depuis plusieurs décennies à la maison diocésaine, à l’accueil de diverses associations catholiques et à une activité de location de salles.

Nous avons dû réinterroger le mode de fonctionnement et d’animation de cet immeuble car il n’est plus totalement adapté à l’émergence récente du télétravail et le rapport qualité/ prix de son offre de locations de salles ne correspond plus, depuis plusieurs années, aux attentes d’un marché devenu extrêmement concurrentiel.

L’hypothèse d’une cession de cet ensemble immobilier a rapidement été écartée par le conseil épiscopal compte tenu du projet d’extension de la gare Saint Charles attendu pour 2035 et dont les retombées devraient être bénéfiques à l’ensemble du quartier et en particulier à la valorisation future du Centre le Mistral, qui sera idéalement placé. Un projet visant à réunir au Mistral, en plus de la maison diocésaine, un pôle dédié à l’enseignement supérieur catholique, en lien avec la direction diocésaine de l’enseignement catholique, est actuellement à l’étude.

En dehors des travaux d’entretien voire de restauration des églises, comment valorisez-vous le patrimoine immobilier du diocèse ?

 Les immeubles qui ne sont affectés ni à l’exercice du culte, ni à l’activité des établissements d’enseignement catholique, ni à la vie paroissiale ou au catéchisme, ni au logement des prêtres et des religieux ou religieuses en mission peuvent servir à générer durablement des produits locatifs. C’est pourquoi, depuis plus de deux ans, le diocèse a entrepris de mettre systématiquement en valeur ces biens en investissant dans leur transformation, leur remise en état ou leur mise aux normes thermiques ou d’habitabilité pour les mettre en location. L’objectif est d’investir dans ces actifs dormants pour en faire des investissements productifs. C’est une nouvelle source de revenus pour l’Église, qui en a besoin pour assurer dès aujourd’hui le traitement des prêtres et des laïcs au service de l’Eglise, et faire face à toutes ses charges. Ces traitements sont normalement assurés par le denier de l’Église mais actuellement, il ne nous permet de couvrir que la moitié de cette charge ; les revenus locatifs générés nous permettent donc de financer l’autre moitié. De la même manière, des immeubles qui nous ont été légués par des fidèles sont eux aussi affectés, par les revenus locatifs qu’ils génèrent, au financement durable de l’action pastorale de l’archevêché et des paroisses du diocèse. Faire un legs aujourd’hui, c’est donc permettre au diocèse d’assurer dès maintenant et demain la vie de ses prêtres et de tous ceux qui donnent 100 % de leur temps pour le service de la mission de l’Église.

Le diocèse s’est aussi engagé dans la construction : pourquoi ?

 Le diocèse peut en effet construire, comme c’est le cas en ce moment, avec 13 logements construits ou réaménagés à neuf rue de la boucle à Marseille (13012) sur un terrain de la Paroisse de l’Immaculée Conception. Ils produiront dès avril 2026 près de 180 000 € de revenus locatifs annuels. L’objectif n’est pas de faire de la promotion immobilière, mais de contribuer de manière durable au financement du fonctionnement du diocèse et de ses paroisses. En construisant et en louant des logements, nous nous donnons les moyens de poursuivre notre mission d’annonce de l’Évangile, dans un contexte de grande fragilité et volatilité des dons.

Je précise que le diocèse ne construit pas de logement social, car il n’a pas l’agrément pour cela. En revanche, il n’hésite pas à investir des sites et à produire du logement dans des quartiers ou peu de personnes investissent. Ainsi sont créés des logements rénovés aux « périphéries » de la ville grâce au diocèse. Dans une ville comme Marseille, où le mal-logement est un problème majeur, c’est aussi une façon pour l’Église d’apporter sa contribution à la vie de la cité et au bien commun.

Crédit photo Robert Poulain

A retrouver dans le numéro d’avril 2025 d‘Eglise à Marseille

 

Publié le 21 avril 2025 dans

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