Devenir un humain de plus en plus humain 

« Il ne sait pas lire, ni écrire. Les mots peuvent être difficiles à comprendre. Il a trois chromosomes là où la plupart n’en avons que deux. Et il a, lui aussi, des talents incroyables. Au moment de mon dessert, deux bras viennent m’entourer, sa tête se rapproche de mon oreille me murmurant : « j’t’aime bien ! t’es beau ! ». Il n’est pas le seul, des personnes accueillies/accueillantes de la communauté de l’Arche à Marseille, à user de cette liberté à dire de ces paroles qui sèment de la tendresse dans le cœur des accompagnants. D’autres viennent poser leur main sur mon épaule ou remonter mon col de pull-over comme pour signifier « je peux compter sur toi et tu peux compter sur moi ».

Il cueille régulièrement des fleurs qu’il offre à l’autre avec son regard qui rappelle Isaïe 43, 4 : « Tu as du prix à mes yeux et je t’aime ».

Et puis, dès qu’on diffuse de la musique, il nous embarque dans l’esprit de la fête qui nous sort de notre préoccupation du moment. Il tord son corps comme personne ne saurait le faire pour initier la danse dans laquelle nous devons entrer.

C’est certain : les personnes que nous accompagnons dans leur quotidien sont aussi celles qui distillent de l’essentiel, de l’existentiel, dans notre quotidien : l’indispensable lien de la relation qui exhorte que je ne peux être que si tu me reconnais ; l’urgence de la réconciliation (parce qu’il y a par moment de la colère ou de l’angoisse qui fait violence, à apaiser) parce que la rupture du lien est inconcevable ; la joie qui doit ensoleiller notre journée pour capter de cette vitamine qui donne une bonne santé mentale.

Oui, il est fragile, mais il est debout. Oui, il est fragile et nous proposons notre accompagnement et des moyens pour se développer. Oui, il est fragile et il nous délivre de la tendresse qui participe à devenir un humain de plus en plus humain, de plus en plus vivant. »

Jean-François, directeur de l’Arche de Marseille

Crédit photo Arche Marseille

À retrouver dans Église à Marseille