François, berger de son peuple, avocat des pauvres et frère de tous

En l’église Santa Maria ai Monti, sa paroisse romaine, le cardinal Jean-Marc Aveline, archevêque de Marseille, a présidé l’eucharistie le dimanche 27 avril, dimanche de la Miséricorde mais aussi fête de Notre-Dame-des-Monts et donc fête paroissiale. A cette occasion, les nouvelles archives historiques de la paroisse ont été bénies. Voici l’homélie du cardinal Aveline.
« Alors que les portes du lieu où se trouvaient les disciples étaient fermées par crainte des Juifs, Jésus vint au milieu d’eux et leur dit : « La paix soit avec vous ! ». Ce faisant, il leur montra ses mains et son côté. Les disciples se réjouirent de voir le Seigneur. »
Frères et sœurs bien-aimés,
Depuis cette nuit de Pâques, il y a une semaine, nous entrons peu à peu dans l’expérience des disciples de Jésus et nous partageons leur joie de voir le Seigneur Jésus victorieux de la mort et d’entendre avec eux cette parole libératrice : « La paix soit avec vous ! ». Leur témoignage, jusqu’au bout, nous donne de contempler Jésus lui-même venant à eux, dans sa chair blessée et transfigurée. Avec le Seigneur ressuscité, c’est notre humanité blessée qui est appelée par le Père à la vie éternelle. Dieu a fait alliance avec nous et n’est jamais revenu sur sa parole : en son Fils bien-aimé, mort et ressuscité, il est allé jusqu’au bout de son amour pour nous. Le Christ a partagé nos souffrances, nos angoisses, notre mort, pour lancer, dans ces ténèbres, son cri de confiance : « Père, entre tes mains, je remets mon esprit » (Lc 23,46). En ressuscitant son Fils, le Père a répondu à cette confiance et à tous les cris de notre humanité. C’est vrai : le Christ est vraiment ressuscité et personne ne pourra jamais nous séparer de l’amour de Dieu (cf. Rm 8,35) !
Aujourd’hui, l’Esprit Saint nous appelle à partager cette joie et cette confiance. Mais il faut le reconnaître : ce n’est pas toujours facile ! Nous le voyons avec l’apôtre Thomas qui veut toucher le Christ, sans se contenter (et il a raison !) d’une simple apparition d’un esprit évanescent : « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous et si je ne mets pas ma main dans son côté, non, je ne croirai pas ! » (Jn 20,25). La confiance ne va pas de soi, même pour un apôtre qui a vécu trois ans avec le Seigneur et qui a vu tant de signes et de miracles. Surmonter le désespoir de la mort n’est pas si aisé, nous le savons tous très bien. Nous pouvons nous laisser envahir par les soucis de la vie quotidienne, la suffisance de l’orgueil, les épreuves de l’expérience, et oublier la présence du Seigneur. En effet, cette présence est une petite flamme en nous, invincible, certes, mais si fragile et si discrète : nous pouvons l’ignorer et la déserter. Notre fête nous rappelle l’appel de la Madonna dei Monti à l’ouvrier qui s’apprêtait, sans le savoir, à détruire son image ancienne et cachée : « Ne fais pas de mal à l’Enfant ! ». La présence du Christ ressuscité est comme un petit enfant : elle a besoin de temps et de soins. Et notre cœur peut devenir une véritable grange dans laquelle la belle fresque de la ressemblance de Dieu demeure cachée et risque d’être détruite. Ne pas blesser la présence du Christ ressuscité et la cultiver pour recevoir la récompense de la confiance et de la paix, voilà notre tâche ! Pour nous aider, je vous propose trois points à méditer et à vivre en vous appuyant sur l’exemple et le ministère de notre bien-aimé Pape François.
Premier point, tiré de notre première lecture : « On allait jusqu’à sortir les malades sur les places, en les mettant sur des civières et des brancards : ainsi, au passage de Pierre, son ombre couvrirait l’un ou l’autre ». En tant que successeur de Pierre, le pape François a touché, par sa présence ou sa parole, de nombreuses personnes, souvent blessées par la souffrance et le désespoir, par des conflits sanglants ou des exils douloureux. Jusqu’au dernier moment, le jour de Pâques, ses propres faiblesses et ses souffrances n’ont pas diminué la force de son témoignage : il a donné la bénédiction urbi et orbi, à la ville et au monde, et il est descendu pour saluer son peuple. Cette force de Pierre en lui ne venait pas de lui, mais de ce lien profond avec le Christ réellement présent. Nous devons garder ces derniers gestes du Pape François comme un cadeau de Dieu : la présence du Ressuscité a été rendue palpable dans la faiblesse de son serviteur. Nous aussi, nous sommes appelés à cultiver, dans toutes les faiblesses de notre vie, cette confiance invincible en la présence de Dieu, sans laquelle notre témoignage chrétien n’a ni sens ni contenu.
Deuxième point, tiré de la seconde lecture : « Ce que tu vois, écris-le dans un livre et envoie-le aux sept Églises ». Ce livre, comme l’a manifesté le pape François, nous l’écrivons avec notre vie. Il nous a montré que l’Église n’est pas une simple organisation sociale, ni même un « club » de parfaits. C’est une communauté de « sauvés » dans laquelle chacun peut trouver le repos, la paix, la tendresse et la confiance. Le Christ ressuscité est cette miséricorde qui nous appelle à nous remettre debout et à considérer tout être humain comme un frère, une sœur pour lequel il est mort. Cette fraternité est universelle : nous sommes « fratelli tutti » et personne ne peut manquer dans l’Église. Elle n’est donc pas une douane mais un hôpital. Et la servante de l’amour. Plus nous réaliserons en nous cette miséricorde qui nous choisit (la devise du pape était « miserendo atque eligendo ! »), plus nous serons ce livre de l’Église offert au monde par le Seigneur !
Troisième point, tiré de l’Évangile : « De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, Je vous envoie. Recevez l’Esprit Saint ». La seule préoccupation du Pape François était d’offrir l’Évangile. Cette mission est avant tout celle de l’Esprit qui nous a choisis pour collaborateurs. Il ne s’agit pas de devenir les zélateurs d’une proposition morale ou religieuse, comme il en existe tant d’autres. Il s’agit de faire rayonner dans nos vies la miséricorde qui nous a sauvés et choisis. L’Esprit nous rend familiers de Dieu. Il nous permet de discerner son œuvre dans les personnes et les peuples et de nous mettre au service de son œuvre patiente et profonde. Combien de personnes découragées, perdues, souffrantes connaissons-nous dans notre quartier ? Parfois, un sourire, un appel téléphonique, une visite, une main tendue, peuvent devenir le signe sacramentel de cette miséricorde divine et de l’appel de Dieu : « J’ai besoin de toi ! Lève-toi ! ». Combien de fois le Pape François nous a-t-il invités à quitter nos canapés pour répondre au Seigneur et répandre la joie de l’Evangile ?
Certitude de la présence divine, humble service de l’Église et joie de la mission, voilà les trois attitudes que nous pouvons cultiver pour prendre soin du Seigneur en nous et transformer un peu la grange de nos cœurs en une église splendide comme celle de Santa Maria ai Monti ! N’ayons pas peur ! La réponse à son désespoir, Thomas l’aura huit jours après Pâques : « Avance ton doigt ici et vois mes mains ; avance ta main et mets-la dans mon côté ; cesse d’être incrédule, sois croyant ! ». Dans cet échange entre le Seigneur ressuscité et son disciple, nous trouvons le secret de la confiance, de la paix et, surtout, de la vraie joie : Dieu est, Dieu est présent, vraiment présent, et cela suffit. Le pape François, en choisissant ce nom, a voulu suivre les traces de saint François : pour le Poverello d’Assise, la joie parfaite ne pouvait être rien d’autre que la certitude de Dieu, la lumière dans toutes les blessures et les épreuves, la victoire sur la mort et l’espérance invincible. Merci, cher Pape François, d’avoir été un maillon si important de la chaîne des évêques de Rome. Merci d’avoir été, jusqu’au bout, le berger de ton peuple, l’avocat des pauvres, le frère de tous. Merci d’avoir été tout simplement : François !
Publié le 28 avril 2025 dans A la une, Homélies de Mgr Jean-Marc Aveline
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