Le secret de Marseille

jma chandeleur 2024

Chaque 2 février, quarante jours après la fête de Noël, l’Église célèbre la présentation de Jésus au Temple. Et, pour nous, à Marseille, cette fête liturgique est l’occasion d’un rendez-vous matinal avec les racines de notre foi et l’âme de notre ville. Comment les deux se rejoignent-elles ? C’est le secret de Marseille, que je vous propose d’entrevoir à travers ces trois mots : la lumière, la rencontre, l’espérance.

La beauté de la lumière

Année après année, alors qu’il fait encore nuit, nous montons en procession depuis le Vieux-Port jusqu’à l’abbaye Saint-Victor, comme l’ont fait tant de chrétiens avant nous, fidèles à la mémoire de nos premiers martyrs. Puis, ayant déposé un cierge auprès de Notre Dame de Confession, dans ce grand berceau de notre foi que sont les cryptes de cette basilique, chacun repart avec, dans son cœur, un rayon de la lumière du Christ, pour éclairer ses pas sur le chemin de la vie. Tel est le secret de Marseille : dans cette ville inondée de soleil, plantée sur un décor où la lumière, surtout celle de l’hiver, sublime même ce qui est le plus pauvre, le plus aride ou le plus banal, on sait qu’il y a un lieu, une crypte, à l’abri du regard des touristes pressés, un lieu où, depuis des siècles, se donne à profusion, à tous ceux qui la demandent, une lumière intérieure plus forte que toutes les opacités de nos vies et les obscurités de notre monde : la lumière du Christ, un feu nouveau qui vient de Dieu, un feu qui purifie et qui rayonne, une lumière fragile comme la flamme d’un cierge et cependant puissante comme un brasier d’amour. La beauté de la lumière marseillaise invite secrètement à découvrir la beauté du Christ, « Lumière née de la Lumière » !

Le goût de la rencontre

La Chandeleur, c’est la fête de la Rencontre, l’Hypapantè, selon le nom que lui donnent les chrétiens d’Orient.
Et Marseille, européenne et méditerranéenne à la fois, est une ville de la rencontre, comme cela fut magnifiquement mis en lumière lors de l’inoubliable visite du pape François il y a quelques mois à l’occasion des Rencontres méditerranéennes.
Comme le raconte saint Luc, le vieillard Syméon, au soir de sa vie, avait su voir, dans ce petit enfant que rien, apparemment, ne distinguait des autres, le salut de Dieu qu’il avait tant espéré. Poussé par l’Esprit, il avait pris l’enfant dans ses bras et s’était écrié : « Maintenant, ô Maître souverain, tu peux laisser ton serviteur s’en aller en paix selon ta Parole. Car mes yeux ont vu le salut que tu as préparé à la face des peuples : lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à ton peuple Israël. »
L’Église ne s’y est pas trompée : en nous invitant à prier chaque soir, à l’office des Complies, avec les paroles de Syméon, elle nous aide à nous préparer à la grande rencontre du soir de notre vie. Car la vie, quand on y réfléchit bien, c’est le temps que Dieu nous donne pour nous préparer à sa rencontre. Nul ne sait quelle sera la durée de ce temps, mais ce que l’on sait, c’est qu’à la fin de notre vie, c’est sur l’amour, et seulement sur l’amour, que nous serons jugés.
Pas sur nos convictions philosophiques ni même sur nos appartenances religieuses, mais sur l’amour, bien concrètement : « J’avais faim et vous m’avez donné à manger ; […] j’étais un étranger et vous m’avez accueilli » (Mt 25). Voilà un autre aspect du secret de Marseille : derrière l’exubérance d’une apparente insouciance, on sait ici la précarité de toute existence et l’importance des petits gestes de fraternité.
La densité d’une vie, c’est son poids d’amour. « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime », disait Jésus. En descendant silencieusement dans les cryptes de Saint-Victor, au milieu des martyrs, on comprend ce que cela veut dire. Le goût des autres, si fort à Marseille, invite secrètement à suivre le Christ à la rencontre de tous les humains, car c’est pour tous qu’il a donné sa vie.

La force de l’espérance

Dans un an, en 2025, nous célébrerons une année jubilaire, marquée par le 1 700e anniversaire du concile de Nicée (325), ce concile où fut élaboré le Credo que nous récitons encore aujourd’hui pour exprimer la foi de l’Église. Quelques années plus tard, vers 360, sur les rives de la mer Noire, naissait saint Jean Cassien. Quittant son pays natal en quête d’une vie toute donnée au Christ, il alla d’abord à Bethléem, puis séjourna de longues années parmi les moines du désert d’Égypte, avant de voyager encore, de Constantinople à Rome et d’Antioche à Marseille, où il arriva vers 415. C’est lui qui fonda le monastère de Saint-Victor. C’est lui qui apprit à l’Église de Marseille comment respirer à pleins poumons l’air de la Méditerranée. Et c’est lui qui révéla à Marseille son plus grand secret, rapporté d’Orient, « un secret que nous ont laissé quelques-uns de nos anciens pères » du désert, selon ses propres mots. Il s’agit d’une courte prière, que chacun peut dire à toute heure du jour et à tout moment de sa vie, quoi qu’il arrive. Elle tient en ces quelques mots : « Dieu, viens à mon aide ! Seigneur, hâte-toi de me secourir ! » Voilà ton ultime secret, Marseille : ne jamais baisser les bras, ne jamais déclarer forfait, ne jamais céder au désespoir, en trouvant toujours, par le sens de l’humour et de la mise en scène, une façon de rester debout face aux drames de la vie. Cette force d’espérer, si puissante à Marseille, traduit secrètement une confiance inébranlable en la miséricorde de Dieu. Elle ouvre à la prière, même quand celle-ci se résume en ces simples mots : « Dieu, viens à mon aide ! Seigneur, hâte-toi de me secourir » !

Publié le 07 février 2024 dans ,

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