Passer du soin au « prendre soin »

« Je ne veux plus vivre », une parole cinglante qui raisonne régulièrement dans les tympans d’un soignant. A quoi bon ? Pourquoi se battre encore ? Quel est le sens de cette vie ? Ma souffrance a-t-elle une fin ? Autant de questions contenues la première affirmation. « Je ne veux plus vivre ».
Comment recevoir ces mots lorsqu’on a au cœur la phrase d’Isaïe « Tu as du prix à mes yeux » ? Comment se mettre à l’écoute de la souffrance ? Sa souffrance est telle qu’il souhaite l’abréger ? C’est légitime. Si une douleur physique est bien traitée aujourd’hui, la souffrance reste un paradigme bien délicat à appréhender. Elle s’écoute, se comprend à la limite, mais peut-on la faire disparaître réellement ? Nous sommes bien démunis face à la souffrance.
L’appréhension de la souffrance nécessite une compréhension intégrale de la personne humaine et des dimensions qui la constituent. Cecily Saunders, pionnière des soins palliatifs en Angleterre, a développé le concept de souffrance totale, qui englobe les souffrances physiques, psychologiques, sociales et spirituelles. C’est en s’attachant à ces différentes dimensions de l’être qu’un soulagement de la souffrance semble possible.
Aux souffrances physiques et psychologiques, traitements et thérapeutiques, quid des souffrances sociales et spirituelles ? Soulager la souffrance, c’est prendre le temps de l’écoute. Le temps d’écoute est le premier remède. Il fait passer le soignant au chevet du malade, du « monde du soin » à celui bien plus riche du « prendre soin ». Ce temps de l’écoute est le préalable à l’expression de la souffrance, préliminaire de son soulagement. Il permet de reconnaître à la personne en face de moi sa singularité, de l’aider à recouvrer une dignité, dans le regard que je lui porte, dans le temps que je lui consacre. « Elle me regardait comme une personne regarde une autre personne », ces mots que sainte Bernadette nous offre après sa rencontre avec notre Bonne Mère, sont une clef pour chacun.
Comment redonner aujourd’hui à chaque vie, le temps de l’écoute, en accord avec Saint Exupéry lorsqu’il exprime : « C’est le temps que tu as perdu pour ta rose, qui fait ta rose si importante » ? Si chaque vie est importante, accordons-lui le temps qu’elle mérite.
Thomas, ancien responsable d’unités en Ephad et aujourd’hui chargée de projet à l’Ordre hospitalier de Saint Jean de Dieu
Crédit photo: Sabine van Erp de Pixabay
A retrouver dans Église à Marseille
Publié le 28 novembre 2024
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